Méfiez-vous du rapace en vous...

Timothy Gainsbury

Je me réveillais tranquillement en sentant quelque chose malaxer mes chevilles. Je grognai et rejetai brutalement ma couette quand je sentis une légère piqûre sur mon pied. Un bruit de chute et un sifflement colérique m'apprirent que je venait de projeter mon chat hors de mon lit. Je sifflai en retour à son encontre et me levai lentement. Le sol froid sous mes pieds me donna le coup de fouet dont j'avais besoin pour émerger totalement.

Je me dirigeai vers la salle de bain et me passai un coup d'eau glaciale sur le visage. Je jetai un coup d’œil au miroir, la froid soudain ravivait mon teint, je souris. Je retournai dans ma chambre et fouillai dans mon armoire tranquillement en sifflotant. Mûre répondit avec un cri rauque. Je ris quand je sentis ses petites pattes se serrer sur mon épaule nue. Je sortis de l'armoire un pantalon en tissu beige, une chemisette blanc cassé et un pull en cachemire épais vert forêt. Je glissais mes bottes en cuir brun à mes pieds avec entrain prête pour la journée qui s'annonçait.

Je devais retrouver Timothy Gainsbury au terrain de Quidditch, il avait promis de m'apprendre à voler. A Anna Göldin, j'avais raté la plupart des leçons de vol parce que je passais mon temps à m'accrocher aux murs avant d'avoir dépassé les trois mètres. Je n'avais pas le vertige mais sur les balais de l'école j'avais vite détesté le vol. Ce n'était pas assez stable, pas assez tangible. Je grimaçai, j'avais l'impression de flotter, et pas de façon agréable. J'avais assez évité ça, je voulais affronter mon dégoût et Tim s'était proposé pour m'aider. Je n'allais pas refuser, je l'aimais bien, même s'il manquait de subtilité.

Je retournai devant le miroir et regardai attentivement mon reflet. Avec une moue, je décidai de laisser mes cheveux détachés aujourd'hui, je les nouerais ne catogan juste avant de monter dans les airs, pour ne pas être gênée. Je glissai donc un de mes rubans dans ma poche. Je me mis une touche de rouge à lèvre et de mascara. J'avais la chance de n'avoir pas besoin de beaucoup de maquillage, je n'aurais jamais supporter de m'étaler une dizaine de crème sur la peau tout les matin. Où se trouve le bien être dans ce genre d'habitudes ?

En filant vers la porte, je m'emparai de ma longue cape verte et me glissai dedans en marchant le long du couloir vers le réfectoire. Je pris un pomme et un verre de jus de citrouille et marchai ensuite d'un pas vif vers le terrain de Quidditch. L'air était frais et vivifiant, délectable, pas de pluie qui menaçait, juste un ciel bleu et vide, parfait. Le soleil d'hiver ne réchauffait pas l'atmosphère mais adoucissait la morsure du vent. Je frissonnai de plaisir tandis que je m'approchai du mur d'enceinte du terrain. Je m'adossai à la porte d'entrée avec nonchalance et attendit, il n'avait pas intérêt à être en retard le petit. Et malgré tout, j'avais hâte de commencer.

Méfiez-vous du rapace en vous...

Timothy Gainsbury

Je commençai sérieusement à m'impatienter, observer la nature hivernale m'occupait mais pas assez. Je voulais essayer de voler par Merlin ! Pas voir des botrucs remonter le long de branches ! En soupirant, je franchis la porte du terrain et montai les gradins. Au moins j'allais attendre assise. Et puis je savais que Timothy n'était pas le gars le plus ponctuel du monde. Je souris en coin, oh ça non, il ne l'était pas. Je n'étais pas prête d'oublier le nombre de fois que je l'avais attendu lors d'un rendez-vous, ou d'un fête.

Enfin, j'entendis du bruit un peu plus loin. Mon visage s'illumina en voyant le jeune homme arriver. Le soleil matinal donnait des reflets à sa chevelure brune, il était toujours aussi beau. Il me baisa la joue amicalement et je lui souris. « Un peu en retard » dis-je avec un ton faussement réprobateur. Il s'assit à côté de moi tandis que je secouai la tête. Il s'en fichait forcément, comme d'habitude ! Le silence plana un instant, nous observions tout deux le terrain de quidditch vide. Soudain il se leva en me frappant la cuisse, m'arrachant un petit cri de douleur.

En grognant, je le suivis. Il aurait pu taper moins fort l'idiot ! J'étais toujours en train de grommeler quand il se retourna vers moi, en me tendant son balai. Je me précipitai vers lui et souriant soudain. « Je sais décoller, mais je n'ai jamais vraiment voler, tu es sûr que tu veux me voir risquer ma vie et m'écraser plus loin ? » demandai-je d'un air innocent tout en m'emparant de son balai.

Sans attendre de réponse, je le plaçais entre mes jambes. Je déglutis, me figeai, pris une grande inspiration et je tapai du pied par terre. Directement, je m'élevai. Je gémis un peu quand je sentis le sol si rassurant s'éloigner de moi. J'avais pourtant l'habitude d'être en hauteur et je n'avais jamais eu le vertige, mais être sur un balai et être suspendue aux branches d'un arbre, c'était deux choses très différentes. Je continuai de monter de plus en plus. Timothy devenait progressivement petit, lui qui l'était déjà bien assez à son goût. Je gloussai.

Cette pensée m'avait permis de me détendre un peu. En faisant très attention, je penchai le manche vers le bas, je descendis à toute allure, le vent s'engouffra dans mes cheveux et je poussai un cri de joie. Je tournai à gauche, puis à droite et je filai de nouveau vers Timmy, les yeux brillants. « Je crois que j'adore ! Mais je suis pas très douée. » m'exclamai-je. « Ce serait plus amusant si tu pouvais avoir un balai aussi, non ? »

Méfiez-vous du rapace en vous...

Timothy Gainsbury

Je me forçais à rire à sa remarque mais je ne me sentais toujours pas à l'aise. J'aurais préféré avoir des ailes, au moins ça aurait été à moi, comme mon père et j'aurais pu les maîtriser. Là ma vie dépendait d'un bout de bois qui ne me semblait plu si robuste.

La descente fis remonter mon cœur quelque part au niveau de ma gorge mais je finis par réussir à m'arrêter à côté de Tim. Je soupirai de soulagement. « Très drôle... » grinçai-je. « J'ai pas dit ça pour ça, tu m'a très bien compris, idiot, je voulais dire, y'a pas des balai de l'université, plus sûrs ? Comme ça tu récupère le tien et j'en prends un... » remarquai-je en secouant la tête devant sa bêtise.

Mon cœur, qui avait retrouvé sa place normale, remonta soudain quand il s'installa derrière moi. « Tu veux faire quoi, là ? » demandai-je juste avant qu'il me parle de son ''test Timothy''. Je me sentis pâlir. Il n'allais quand même pas... Il passa ses bras de chaque côté de mes hanches et le balai s'éleva de nouveau. Par respect pour ma fierté, je réussis à ne pas crier. Cependant le gémissement qui s'échappa traîtreusement de mes lèvres n'était pas franchement plus digne. J'avais envie d'enfouir mon visage dans mes mains, et en même temps, je craignais de lâcher le balai.

Ceci dit, le fait de sentir le torse chaud de Timothy derrière moi me rassurait un peu, je ne l'imaginais pas me laissant tomber de haut comme ça, sauf peut-être pour me faire un peu peur. Mais je savais qu'il me rattraperait... Enfin je l'espérais très très fort. Je réussis petit à petit à me détendre, ne pouvant néanmoins empêcher mes muscles de se raidir à chaque changement de direction un peu brusquement. J'ouvris complètement les yeux et appréciai la vue. Au final, ce n'était pas si terrible que ça. Je me laissai un peu aller contre Timothy.

Sentir les gradins sous mes pieds me fit quand même un bien fou. Je ris nerveusement et me laissai littéralement tomber sur l'un d'entre eux, mes jambes tremblantes refusant que je tienne debout. « Bon » dis-je dès que je fus sûre que ma voix ne tremblerait pas. « C'était pas si mal, il suffit que je réessaie une autre fois, ou tout à l'heure... Ce doit être une question d'habitude, non ? » ajoutai-je en jalousant puissamment mon père et ses ailes naturelles (qu'il cachait très bien, certes, mais tout de même) et les oiseaux en général.