"Alors comme ça, on commence sans moi ?"

Cette voix, qui s'élevait de tout en bas du stade, au pied des gradins, c'était celle d'Eve John.
Il était, certes, difficile de le voir au premier au premier coup d’œil, mais la Ceart n'avait pas tout à fait sa prestance habituelle, celle qui vous donne l'impression qu'elle possède les lieux où elle se trouve, ou tout du moins qu'elle se les approprie.
Non, Eve n'était pas franchement dans son élément ici, et pour cause : la dernière fois qu'elle avait mis les pieds dans un stade de Quidditch, la suite des évènements l'avait envoyée tout droit à Azkaban.
Si elle avait su qu'elle comptait faire sa petite sauterie ici, elle n'aurait sûrement pas accepté l'invitation d'Arth à venir picoler avec elle. Ou peut-être que si, en fait. Ce n'était pas son genre, de décliner une occasion de faire la fête. Et encore moins de se laisser impressionner par des pensées négatives. Si, lors de sa (courte) scolarité à Poudlard, le choixpeau l'avait envoyée à Gryffondor, ce n'était pas pour rien : ses peurs, elle leur tordait le cou. Ses vieux démons, elle les hanterait elle-même jusqu'à ce qu'ils n'en puissent plus et battent en retraite. C'est ce qu'elle faisait, ce soir là, en mettant le pied pour la première fois dans un stade de Quidditch, depuis cette nuit où elle s'était rendue coupable d'un accident mortel.

Le soleil était en train de tirer sa révérence à l'horizon. Il ne s'était pas montré beaucoup aujourd'hui, caché par intermittence par des troupeaux de nuages argentés qui avançaient paisiblement comme des moutons dans la campagne, mais il avait décidé de faire sa sortie en beauté, irradiant le terrain de ses rayons orangés.
Les yeux levés vers le ciel, à la recherche de sa camarade de Ceart, Eve portait sa main devant ses yeux éblouis par le soleil couchant. Le vent de bord de mer, particulièrement agité donc, et chargé d'embruns, faisait voler ses cheveux longs et lâches de façon totalement désordonnée. Tenter de voler par un vent pareil, alors qu'elle n'avait pas chevauché un balai depuis plusieurs années, et les cheveux lui giflant la figure (les attacher ? elle n'y pensait même pas !) ça allait être folko. Mais avec en plus les quelques bouteilles de sky promises par Arth, ça allait être carrément énorme.

Arrivée au milieu du terrain, la jeune sorcière, balai emprunté à l'école à la main, se mit en position, se donna de l'élan en donna à l'aide d'un bon coup de pied au sol, et s'élança dans les airs.
Le départ fut un peu hésitant, mais force était de constater que le balai, c'était comme le vélo : ça ne s'oubliait pas.
Elle esquissa quelques cercles dans les airs pour se remémorer les sensations du vol, et tester sa résistance physique par rapport au vent, puis se rapprocha d'Arth. Lorsqu'elle fut à sa hauteur, elle lui tendit la main, paume ouverte vers le ciel, comme si elle attendait que la jeune sorcière lui donne quelque chose (en l'occurrence, ce pour quoi elle était venu : de l'alcool).

"Alors, c'est quoi le plan, on se bourre la gueule, et on regarde qui se casse la gueule de son balai en premier ? Si c'est ça, jsuis carrément partante !"