Il devait être huit heures du matin lorsque Sacha se réveilla, d'une extrême bonne humeur. Le week end. Pas de cours aujourd'hui, pas de devoirs à préparer, rien. Et le temps ensoleillé ne fit qu'accentuer son impression de joie. Elle se leva d'un bond léger, ouvrit ses fenêtres, se mit un peu de musique, et c'est en virevoltant qu'elle prit son petit déjeuner. Alors qu'elle se demandait ce qu'elle allait bien pouvoir faire en cette belle journée, son regard se posa sur son violon, situé sur le buffet juste en face d'elle. Ah, eh bien oui, pourquoi pas ? Une bonne matinée de gammes, accompagnée de quelques bribes de concertos... puis un repas tranquille, et enfin du violon jusqu'à l'épuisement. Oui, ça promettait d'être une belle journée. D'autant plus que l'école disposait d'une salle de musique que l'on disait confortable, et qui n'était jamais occupée, alors autant en profiter. Elle s'habilla soigneusement, d'une jupe longue plissée en voile, et d'un petit pull en maille fine,puis chaussa ses habituelles bottines, prit ses lunettes, son paquet de partitions, son pupitre, et plaça son violon sous son bras. Fin prête pour le travail. « C'est parti! » se lança-t-elle à elle-même joyeusement avant de sortir de ses appartements et de dévaler les escaliers du deuxième étage (où elle faillit d'ailleurs tomber plus d'une fois).

Sacha marcha quelques dizaines de minutes, ouvrit quelques salles de cours et quelques placards (d'où s'échappèrent parfois quelques rats) avant de trouver enfin la salle de musique. Mais qu'importe. Aujourd'hui, la bonne humeur et la motivation étaient de mise. Lorsqu'elle poussa la porte, Sacha fut encore plus ravie. La salle regorgeait d'instruments anciens, qu'elle n'avait jamais vu auparavant. Elle posa précipitamment son violon sur une table pour s'adonner à la contemplation d'une sorte de viole de gambe à deux cordes pendant un bon quart d'heure, sans vraiment savoir comment la faire marcher, et tourna et vira parmi durant un petit bout de temps avant de défaire la boite de son propre instrument. Elle ouvrit les fenêtres pour avoir plus de lumière, (fut enchantée de constater qu'elles donnaient une vue charmante sur le parc), sortit son épaulière, tendit son archet, et commença sa série de gamme d 'échauffement rituelle. Flesch, Schradieck, gammes en dixièmes, en octaves, en tierces, aucune ne lui échappa. Et quand ses doigts furent bien échauffés, elle sortit enfin son recueil de sonates. Elle hésita un instant, puis se dit que « Le printemps, sonate n°5 » de Beethoven s'offrait parfaitement au cadre de ce jour idyllique. Le cœur léger, elle entama le début de la première page, puis la deuxième, mais s'arrêta net. Elle avait la vague impression d'être écoutée. Elle ne ressentait de la part du visiteur inattendu aucune méchanceté, mais une curiosité presque palpable qui la gênait toujours un peu pour jouer.

« Qui... qui est là ? »

Risqua-t-elle, déchaussant ses lunettes, le regard fixé sur la porte entrebâillée.


[désolée pour ce début de RP pas génial >< ! Je ferai mieux la prochaine fois, promis TT.]

Si Clementine s'était levée si tôt alors que c'était le week-end, c'est parce qu'elle avait un cauchemar. Un véritable cauchemar qui lorsque vous vous réveillez vous paralyse encore pendant quelques minutes. Paralysée c'était l'état dans lequel la petite brune était dans son mauvais rêve. En effet des lapins mutants étaient en train de la manger toute crue, et elle ne pouvait pas s'enfuir, pas crier, rien, elle était prise au piège. Et lorsqu'elle ouvrit les yeux, enfin délivrée de cette situation psychologiquement douloureuse elle ne pouvait plus bouger tellement la peur l'avait envahie, des ongles de doigts de pied jusqu'à son cuir chevelu. Cela prit une ou deux minutes afin que l'étudiante revienne à son état normal, à vrai dire elle était traumatisée par son cauchemar, elle qui pensait que les lapins étaient les animaux les plus gentils et les plus mignons de toute la terre. Erreur ! Voilà, à présent dès qu'elle croiserait un lapin elle serait tétanisée, et tout cela à cause d'un mauvais rêve, à cause de son sub-conscient ou je ne sais pas quoi. Décidément, il s'en passait de drôles de choses dans sa tête.
Mais la pensée de ce rêve fut bien loin lorsque Clem regarda par la fenêtre, même si elle se boudait elle-même parce qu'il était tôt, le soleil resplendissant dans ce ciel bleu lumineux la rendait heureuse, très heureuse. D'ailleurs il est bien rare de voir Clementine dans un autre état que celui là. A vrai dire, la nimh avait envie de chanter, danser, manger ! C'était le week-end et il fallait qu'elle en profite, ça lui faisait enfin une coupure avec les cours, le boulot, et tout le tintouin.

Ni une, ni deux la petite orange se lava et s'habilla d'une robe colorée et fleurie, laissa ses cheveux détachés mais mit un foulard vert dans ceux-ci. Elle sentait l'été et c'était fabuleux en ce mois de septembre.
Il fallait qu'elle vagabonde, qu'elle découvre le plus possible son université. En effet celle-ci était tellement grande que l'étudiante s'était déjà perdue plusieurs fois, or aujourd'hui c'était le bon jour pour remédier à ce petit problème. Même si on se doute bien que ce n'est pas dans le caractère de Clem que de ne pas se perdre, mais bon, qui ne tente rien n'a rien. Finalement, elle sortit de son dortoir et marcha là où son petit coeur lui dit d'aller, sans vraiment réfléchir, le sourire aux lèvres avec un merveilleux pas dansant.

- Lalalalalalalalalalalala

Ca c'était l'air que fredonnait Clem d'un air faux. Mais c'était la preuve de son bonheur à cet instant même. D'ailleurs la petite brune se cru alors dans un film car alors qu'elle dansait dans un couloir en faisant un tour sur elle-même elle entendit de la musique. Et sa première réaction fut : . En effet il était bizarre que alors qu'elle chantait et dansait de la musique se mette en route. Et une nouvelle fois l'idée qu'elle était espionnée lui vint à l'esprit. Non il ne fallait plus penser à ça. Et au lieu de s'inquiéter, Clem arrêta de chanter et de danser et se mit à la recherche de la source de cette mélodie.
A vrai dire, ce n'était pas vraiment moche à entendre, et plus l'américaine avançait, plus le son semblait augmenter. Elle se rapprochait.
Finalement elle se sentit très bête lorsqu'elle arriva devant la salle de musique. En effet, quelqu'un devait jouer un instrument -dont elle ignorait le nom-, rien de plus normal dans une salle de musique, et encore une fois Clem s'était inquiétée pour rien.
Mais alors qu'elle aurait très bien pu repartir afin de vaquer à ses diverses activités, la curiosité la retint et elle jeta un coup d'oeil par la porte. Elle vit une jeune femme en train de jouer de la musique avec une sorte de grosse poire marron. C'était rigolo à regarder et en même temps Clementine se sentit pleine d'admiration envers cette personne qu'elle trouvait si douée.
Soudain cette femme s'arrêta de jouer brutalement, surprise la petite brune s'écarta de la porte et se colla sur le mur extérieur afin de ne pas être vue. Décidément, la musicienne était trop forte, elle avait du se sentir observée ! Ou alors c'était un piège, la musique étant l'appât qui devait amener la petite orange dans cette salle.

Quelle parano quand même inh. Puis, la nimh entendit la voix de la jeune femme demander qui était là. Bon d'après le timbre de sa voix elle n'avait pas l'air bien méchante, voire même gentille. Et vu la position dans laquelle Clementine était on aurait dit qu'elle avait fait une bêtise, alors que ce n'était pas du tout le cas, ou pas encore du moins.
Il fallait qu'elle arrête de faire la timide, finalement au bout d'une minute elle décida de se montrer et entra dans la salle de musique à petits pas.

- Heu... héhé ... je ne voulais pas vous déranger mais... je passais par-là et je vous ai entendue jouer...

Clem avait prononcé ces mots avec une petite voix de petite fille et sa tête ressemblait plutôt à ça : . Qu'elle pouvait être mignonne quand elle le voulait.
Mais la timidité n'était pas vraiment son truc, et alors qu'elle s'avançait dans la pièce, elle accéléra le pas et s'assit à côté de la jeune femme en lui faisant le plus grand sourire qu'elle n'ait jamais fait.

- C'est quoi ça ? Comment ça s'appelle ? Vous jouez troooop bien !

Oui, la petite brune avait des étoiles dans les yeux tellement elle était admirative. Il est vrai qu'elle ne connaissait pas vraiment les instruments de musique, n'en ayant jamais fait de sa vie. Ce n'est pas qu'elle n'aimait pas ça, mais disons qu'elle trouvait que ce n'était pas son truc et que de toute façon elle ne serait pas douée pour ça.
Clementine tendit alors un doigt vers la grosse poire de la jeune femme et toucha un peu la matière. C'était comme si elle touchait un rêve du bout des doigts, c'était trop bô et c'était la première fois de sa vie qu'elle touchait un instrument de musique. Oui vous allez me dire, Clem n'a pas fait grand chose dans sa vie, ce qui n'est pas faux. Mais aussi vite, elle retira son doigt, peut-être que c'était pas bien et qu'elle n'avait pas le droit, avec une moue gênée, elle baissa la tête. C'est alors que non loin elle aperçut une trompette ! Une vraie ! Une jolie petite trompette ! (oui elle savait ce que c'était une trompette). Alors là, c'était l'occasion rêvée, en moins de deux secondes l'étudiante attrapa la trompette et se tint debout devant sa nouvelle rencontre.

- Eeeeeh ! on pourrait faire un duo ! Au fait, je suis Clementine.

Bon évidemment elle n'avait pas précisé qu'elle n'avait jamais fait de trompette de toute sa vie, mais ça pouvait être très rigolo ! Elle fixa alors de ses grands yeux marrons sa copine du jour en attendant une réponse de celle-ci, tout en espérant qu'elle soit positive.

Sacha mit quelques temps à faire intégrer à sa conscience ce qui se passait, tant c'était allé vite. Une jeune fille châtain et colorée comme tout venait de débarquer dans la salle où elle travaillait, et s'était approprié l'espace en un temps record. En une vingtaine de secondes, elle : a) était passée de la timidité à la confiance, b) avait regardé et touché son violon avec un air béat, c) avait empoigné une trompette qui se trouvait là, d) s'était présentée. Sacha aurait pu être fâchée, mais la naïveté de la nouvelle venue était si touchante, et lui rappelait tellement sa première visite d'une lutherie qu'elle lui pardonna tout instantanément.(En fait, elle ne s'en rendait pas compte, mais elle était plutôt mal placée pour juger de la naïveté des autres...enfin passons.) Elle décida de considérer sa proposition. Après tout, pourquoi pas, un duo, ça pouvait toujours être enrichissant ! Mais quelque chose lui disait que cette Clémentine ne possédait pas de grandes connaissances en la matière. Elle lui dit en souriant :

« Enchantée, je suis Sacha Rotshield, une nouvelle enseignante. Mon instrument s'appelle le violon. Tu fais de la trompette ? Me montrerais-tu ? »

Elle considéra la jeune fille en face d'elle, sans même s'être rendue compte qu'elle l'avait tutoyée. Celle-ci souffla avec enthousiasme dans l'instrument doré. Un son cristallin et une étrange fumée bleutée s'échappèrent du pavillon. Sacha sentit d'un coup une sorte de frénésie l'envahir, ainsi qu'une soudaine envie de sauter par la fenêtre. Elle était un oiseau. Une hirondelle, oui, une hirondelle. Et puisqu'elle était une hirondelle, elle pouvait voler, et il fallait absolument qu'elle essaye. Elle s'avançait déjà vers la fenêtre, quand une espèce de note étrange que Clémentine venait de jouer la sortit de ses idées. Elle jugea bon de lui retirer la trompette des mains, avant que cette dernière ne la fasse vraiment s'envoler vers les racines des pissenlits du parc. Constatant la mine déçue de la jeune fille, elle lui posa son violon entre les mains, et entama de lui expliquer comment il devait se tenir.

« Tu dois poser l'instrument sur l'épaule gauche. Tu vois, ici tu as la mentonnière. Tu places ta mâchoire dedans. Il faut que le violon tienne tout seul, même quand tu le lâches. Voilà, très bien ! »

Sacha était ravie. Son élève improvisée avait tout de suite saisi la tenue du violon, et c'était plutôt rare pour une débutante.

« Ensuite, pour jouer il faut... »

Elle se retourna et prit son archet.

« Un arch... non ! Pas avec la baguette !!»

Sûrement emportée par son enthousiasme, Clémentine avait visé les cordes de sa baguette magique, sans doute dans le but d'en sortir un son original. Un éclair verdâtre foudroya le violon, qui retomba mollement à terre. Oui, mollement était bien là le mot exact. Car il était devenu aussi mou qu'un ballot de vieux chiffons. Le silence se fit dans la pièce, aucune des deux jeunes femmes ne semblant vraiment comprendre ce qui se passait. Sacha sortit lentement sa propre baguette mais...

Trop tard. Clémentine s'était déjà proposée pour arranger le problème, avait pointé la sienne sur le chiffon marron, et marmonnait quelques incantations. Plusieurs éclairs de couleur enveloppèrent successivement l'instrument mou, sans que cela n'ait d'effet. Mais soudainement, ce dernier se redressa sur le sol. Droit comme un I, il sembla prendre vie, et commença à sautiller en rythme, de plus en plus rapidement. Sacha ne savait que faire. Elle tenta quelques sortilèges, mais ils ne se révélèrent aucunement efficaces. Pire encore, au bout de la troisième tentative, la chose étrange qui avait remplacé son instrument se mit à se jeter contre les murs. Et au bout de la quatrième, les ouïes s'ouvrirent en deux cercles béants, et il s'exclama d'une voix aigrelette :

« ♫ C'EST LA LUUUTEUUUH FINAAAALEUH … !!♫ »

Sacha ne comprenait plus rien. Déjà, son violon était subitement devenu mou. Ensuite, il sautait partout. Et maintenant il entonnait des chants révolutionnaires ??? Elle essayait de remettre de l'ordre dans ses idées qui n'étaient plus très claires, mais... elle fut tirée de ses pensées par un cri de Clémentine qui lui demandait de faire quelque chose, car l'instrument fou arrachait la tapisserie.

Et en effet, le violon qui n'en était plus vraiment un entamait d'enlever progressivement le papier peint. La jeune enseignante, courut vers lui pour l'attraper, mais il lui échappa, et se mit à sautiller dans la pièce...

« ...ET DEMAAAAIN, L'INTERNATIONAAAAAALE SERAAA LE GENRE HUMAAAAIN !! ♫ »

...jusqu'à s'enfuir par la porte entrouverte.