Mardi 5 mai 1977, avant-midi
Température : Nuageux et pluvieux

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Yasmine était réveillée depuis très longtemps, trop longtemps, en cette journée pluvieuse et incroyablement grise où tout semblait se confondre à l’extérieur. Le temps nuageux et brumeux n’aidant pas, on ne voyait que du gris par les fenêtres de l’établissement. Hors du lit depuis 4h45 ce matin-là, Yasmine avait tourné en rond dans sa chambre pendant plus d’une heure avant de se décider à sortir en laissant tout en plan tant ses livres d’études étalés sur son lit que la toile à peine commencée sur son chevalet. Un cadeau pour Walter... à quoi bon en fait puisque leur relation était si difficile désormais. La jeune femme comptait quand même terminer l’œuvre puisqu’elle se refusait à laisser un travail inachevé, mais elle n’y avait travaillé que quelques heures depuis le début de la mise sur toile et tout ce que l’on pouvait voir jusqu’à présent c’était les détails de la salle commune des Serdaigles à Poudlard esquissés et rendus au crayon sur le canevas blanc. L’aigle n’avait même pas encore commencé à replacer les personnages de la scène dans le décor.

*Ce soir peut-être... non, je dois terminer la retranscription du travail de Botanique... ah et puis non, je le ferai jeudi... ce soir, je vais terminer de dessiner sur canevas au moins et peut-être commencer à peindre* pensa-t-elle en regardant la toile inachevée avec un regard triste et étrangement dénué de la lueur s’y trouvant habituellement lorsqu’elle s’attardait sur un projet.

"Qu’est-ce qui se passe avec toi?" se demanda-t-elle à haute voix alors qu’elle se glissait dans le couloir silencieusement simplement vêtue d’un pantalon noir avec de fines lignes verticales argentées et d’une robe bustier descendant à mi-cuisses d’un jaune ambré .

Mais elle le savait très bien ce qui se passait, même si elle ne l’aurait jamais avoué directement. Elle était toujours amoureuse et la situation conflictuelle la minait terriblement... et il y avait Zòhra aussi. La belle slave dont le regard avait tout de suite captivé Yasmine à un tel point qu’à leur deuxième ou troisième rencontre, elle lui avait demandé si elle pouvait la prendre comme modèle pour dessiner. Ce qui avait donné une toile offerte à la jeune slave et quelques dessins bien cachés dans un cahier à dessin qu’elle gardait totalement secret étant donné la nature controversée des dessins s’y trouvant. L’esprit de la jeune anglo-égyptienne était sans cesse torturé entre les deux, Walter son amour du passé et Zòhra la belle jeune femme qui était apparue dans sa vie il n’y avait pas si longtemps.

Les pas de Yasmine la conduirent à quitter le long couloir des dortoirs des filles et, après un passage obligé dans la salle commune, elle se retrouva à monter l’escalier pour se rendre à la volière où elle entra avec un sourire en voyant le nombre incalculable d’oiseaux se trouvant dana la pièce. Elle s’assit près d’une fenêtre et sortit une missive qu’elle avait écrite la veille avant de s’endormir d’un sommeil agité et qu’elle destinait à Katherine et Théodore, ses grands-parents adorés.

Yasmine Knight a écrit:

"Bonsoir à vous deux,

Le temps est gris et froid ici depuis quelques temps, nous avons eu de belles chaleurs il y a quelques semaines, mais tout cela est bien loin derrière et tout est sombre à St. Barnaby actuellement. Que ce soit la température extérieure ou mes relations interpersonnelles, rien ne semble vouloir s’améliorer. J’espère que de votre côté tout se passe bien et que le travail de grand-père se passe bien au Ministère.

J’ai hâte que l’été arrive et que je puisse enfin rentrer, vous ne pouvez pas savoir à quel point vous me manquez ainsi que le domaine. J’aurais tellement envie de me retrouver sur les terres et laisser mes pieds s’enfoncer dans le gazon... l’hiver est terminé heureusement c’est déjà cela de gagner.

Je viendrai sans doute à la maison durant la fin de semaine, si cela ne vous dérange pas, vous me manquez trop et je suis trop loin ici... j’ai besoin de me ressourcer et de manger un bon repas préparé par grand-mère. Oh! Et un bon whisky et une partie d’échec avec toi grand-père! Bien entendu, comme toujours, je ne passerais pas à côté de cela... surtout en ce moment.

Nous vous en faites pas pour moi, cela va passer. La situation est juste devenue extrêmement complexe avec Walter pour le moment, cela se réglera, j’espère. Je vous en reparle durant la fin de semaine si on se voit. Répondez-moi afin de me dire si vous aviez autres choses durant la fin de semaine ou si je peux venir. Je ne voudrais pas vous déranger... mais je pense que je viendrais quand même au domaine si vous voulez... j’aimerais reprendre la maison de papa...

Tendrement,
Bisous

Yasmine
Petit aigle à jamais"

Elle avait relu la missive en tremblant tant d’émotions que de froid. La pièce n’était pas des plus chaudes étant donné que les fenêtres étaient presque toutes ouvertes en tout temps. Ce n’était pas, habituellement, un endroit où l’on s’attardait, mais la jeune étudiante appréciait le contact des oiseaux et leurs cris incessants. Une douce mélodie à son oreille. Doucement, elle referma la missive et se dirigea vers un des oiseaux disponibles. Avec précaution, Yasmine attacha la lettre à une des pattes de l’oiseau, comme elle l’avait fait tant de fois auparavant, et elle le caressa tendrement.

"Aller va mon joli... va visiter le domaine des Knight et délivrer cette missive" avait-elle murmuré en lui caressant les ailes "que ton vol soit doux et rapide!"

Elle savait très bien que rien ne lui servait de parler à l’oiseau porteur, mais elle l’avait toujours fait... comme son grand-père et son père dans ses lointains souvenirs. C’était peut-être ridicule, mais elle le faisait quand même par respect pour l’oiseau peut-être. La jeune femme se dirigea vers la porte et sortit de la volière lentement. Puis, elle secoua la tête en se demandant si elle allait traîner au SorTHÉlège ou à la bibliothèque pour l’avant-midi et décida finalement que la bibliothèque remporterait le concours des pièces où elle irait ce matin-là. Elle descendit donc les quatres étages qui la séparaient de la vaste bibliothèque et, alors qu’elle y était presque, se rappela qu’elle devait remettre trois volumes empruntés plusieurs semaines auparavant.

"Damn!" fit-elle en rebroussant chemin pour regagner sa chambre afin d’aller chercher les livres en question.

Puis, elle fit une halte à la cafétéria afin de prendre un petit déjeuner rapide composé d’un yaourt mangue et ananas, d’un bagel rôti tartiné de beurre et une petite coupe de fruits frais divers. Elle revint donc, finalement, vers la pièce où de nouveaux livres semblaient apparaître toutes les fois qu’elle y entrait après avoir récupéré les derniers livres empruntés pour la finalisation de la composition de son travail de fin d’année en botanique. Il devait être environ 7h30 du matin lorsqu’elle poussa les deux portes permettant l’accès à la vaste salle de lecture.

Après s’être rendue au comptoir pour rapporter les trois volumes en faisant un petit sourire poli à la personne se trouvant sur place, elle se rendit dans les rayons en cherchant rien de bien précis. Yasmine ne cherchait rien en fait et aurait tout aussi bien pu simplement aller s’asseoir pour réfléchir tranquillement en regardant dans le vide, mais c’était toujours plus sympa de lire en même temps, surtout ici. Alors, elle fouilla dans les rayons de romans de la bibliothèque et finit par ressortir avec Germinal un roman d’un auteur français nommé Émile Zola. Puis, lorsqu’elle s’est installée à une table située dans un coin légèrement plus reculé, elle commence à lire avec passion ce roman qu’elle avait déjà lu auparavant plusieurs fois et dont Katherine lui lisait des extraits lorsqu’elle était enfant.

Elle lisait.

Émile Zola dans la première partie de Germinal a écrit:

"Dans la plaine rase, sous la nuit sans étoiles, d'une obscurité et d'une épaisseur d'encre, un homme suivait seul la grande route de Marchiennes à Montsou, dix kilomètres de pavé coupant tout droit, à travers les champs de betteraves. Devant lui, il ne voyait même pas le sol noir, et il n'avait la sensation de l'immense horizon plat que par les souffles du vent de mars, des rafales larges comme sur une mer, glacées d'avoir balayé des lieues de marais et de terres nues. Aucune ombre d'arbre ne tachait le ciel, le pavé se déroulait avec la rectitude d'une jetée, au milieu de l'embrun aveuglant des ténèbres..."

Yasmine se perdit dans sa lecture en réfléchissant en arrière-plan, dans un coin de sa tête, à sa situation actuelle. Que devrait-elle faire à la fin de cette session... la situation avec Walter ne semblait pas partie pour s’arranger... avec Zòhra tout semblait se complexifier à chaque nouvelle dispute entre le jeune homme et elle... et elle n’avait pas beaucoup d’amis dans sa faculté. Certes, elle connaissait des gens, des visages, appréciait ses collègues de cours, mais aucune relation profonde ne s’était créée en bientôt quatre ans.

Pourquoi était-elle venue se perdre dans le nord de l’Écosse alors que toutes les universités magiques auraient très bien pu l’accueillir. Elle avait même reçu une invitation de l’Université Magique Avancée située en banlieue de Londres. Cette dernière l’avait intéressée, au départ, mais lorsque Walter lui avait dit qu’il était inscrit à St. Barnaby, elle avait eu peur de le perdre et s’était inscrit à sa suite dans l’établissement d’enseignement supérieur.

Elle était perdue dans ses réflexions et dans sa lecture, alors qu’elle venait de tourner la page finale du deuxième chapitre, lorsqu’elle sentit une présence proche d’elle et qu’une main se posa sur son épaule nue.

(bonjour je m’appelle Finn et je fais un abus de synonymes que je mets un à la suite de l'autre dans mes RP, merci)

Réflexions et lectures

Dehors c’était moche. Très, très moche. Comme toujours dans ce fichu pays, en fait. Les nuages, lourds et menaçants, déversaient leur hargne sur la lande grisâtre depuis plusieurs heures déjà et ne semblaient pas prêt de s’arrêter. Un vent violent soufflait avec fureur, cognant sans relâche sur les carreaux des fenêtres de St. Barnaby, y projetant des gouttes de pluie glaciales telles de minuscules projectiles. Les arbres se tordaient sous la force des bourrasques grondantes qui étaient venus disperser les longs bras de brume qui étaient venus s’enrouler autour du château plus tôt le matin. On distinguait maintenant au loin, d’immenses vagues recouvertes d’écume luisante venaient se fracasser sur les rochers sombres de la côte. L’océan se déchaînait, implacable, semblant vouloir engloutir la terre ferme et l’attirer dans les tréfonds marins de son ventre colérique. Vraiment, c’était moche et ce n’était pas un temps à mettre le nez dehors.

Heureusement pour lui, Finn n’y était justement pas, dehors. Au contraire. Bien callé dans un des fauteuils moelleux de la bibliothèque, sous une pile de couvertures bien chaudes apportées directement de sa chambre, tenant à la main une tasse de thé noir brulant apporté en catimini de la cuisine, Finn était on ne peut plus heureux. Pour le rouquin qui avait la fâcheuse tendance d’attraper un virus dès que celui-ci commençait à se propager, contempler la température apocalyptique qui faisait violement rage dehors alors qu’il était bien au chaud et en sécurité à l’intérieur avait quelque chose d’extrêmement satisfaisant. Il but avec avidité une gorgée de thé qui lui brula un peu la langue avant de glisser dans sa gorge, mais il n’en avait cure, songeant plutôt à la magnifique journée de farniente qui s’offrait à lui, heureux du déroulement de sa journée jusqu’à date. Techniquement, il n’aurait jamais du se trouver confortablement établi entre deux rangées poussiéreuses de livres de sortilèges avancés. En fait, sa présence était due à un jolie tour du hasard puisque son cour de Duel, prévu ce matin avait été annulé à cause du mauvais temps, le professeur ayant prévu un cours d’évaluation pratique sur le terrain. Le test avait plutôt été remplacé par un travail écrit à rédiger pour la semaine suivante, ce qui expliquait la présence du rouquin dans la bibliothèque.

Finn se cala un peu plus confortablement dans son fauteuil et ouvrit le premier bouquin de la pile chancelante qu’il avait construite à ses côtés, constituée d’ouvrages qui lui semblaient appropriés pour son sujet de recherche. Il feuilleta les pages chargées d’enluminures splendides d’un air concentré, l’esprit acéré, l’œil aux aguets de la moindre information qui serait jugée pertinente. Malheureusement, l’ouvrage, qui pourtant semblait prometteur, dévia rapidement de la branche du sujet qui l’intéressait pour se perdre dans une longue liste de suppositions d’ordre sémantique. Le garçon poussa un soupir, mit l’ouvrage de côté et s’empara d’un autre. Quelques minutes plus tard, même résultat cependant. Rien non plus avec le suivant, ni le quatrième, encore moins dans le cinquième qui traitait plutôt de la surdité chez les hippogriffes. Au bout de ce qui paru des heures et des heures de recherche laborieuse, il n’avait toujours rien et hésitait donc entre trois conclusions :

1- Le prof de Duel était un sadique fini qui, outré que son cours ne puisse avoir lieu à cause de la météo, s’était vengé sur ses pauvres, pauvres, pauvres étudiants (les vraies et seules authentiques victimes de la situation, vraiment c’était des souffre-douleurs) en leur imposant un horrible et immonde travail sur un sujet inabordable, trop avancé, inexistant, voir inventé de toutes pièces dans le seul but de les faire suer corps et âme à une recherche vaine et échouer lamentablement leur année scolaire.

2- Finn était un rouquin niais et irrémédiablement stupide avec un talent terriblement piètre pour la recherche scolaire (le mot piètre étant en fait un euphémisme pour cacher en fait une réelle défaillance psychologique en fait de recherche de documents). Forcément, le garçon regardait avec des yeux aveugles, se fourvoyait entre les ouvrages à choisir et ceux à délaisser, s’étalait, se mélangeait, entremêlait toutes les informations en un magma intraitable, lui bloquant par le fait même les portes de l’efficacité et du savoir universel. Cette conclusion, supposant son incapacité à rechercher correctement une information simple afin d’en fait une recherche théorique le poussait par ailleurs à se questionner à savoir comment, si tel était le cas, il avait pu réussir à terminer ses études à Poudlard et surtout son année précédente au BUM… de la chance peut-être? Cette réponse, quoique superficielle, contredisait la dernière supposition sur laquelle méditait Finn :

3- Il était d’une malchance effarante et tous les ouvrages pertinents traitant du sujet qui l’intéressait avaient déjà été réservé/avaient été cachés par un fantôme de l’établissement ou un élève malveillant/se trouvaient dans un coin sombre, reculé et particulièrement repoussant et poussiéreux de la bibliothèque où il n’osait regarder car il était trop peureux et que la poussière le faisait éternuer, chose qu’il détestait.

Bien sûr, une quatrième conclusion alliant les trois précédentes, à des degrés divers n’était pas à exclure non plus et le grand roux en était là dans ses questionnements, les yeux parcourant les rayons gorgés de textes inconnus à la recherche de quelque chose d’enfin pertinent sur lequel il pourrait mettre une main avide, quand il aperçu, du coin de l’œil, une silhouette qui lui semblait familière. Plissant les yeux, faisant un effort pour mieux voir, il reconnu Yasmine Knight, une jeune fille qu’il avait déjà croisé à quelques reprises dans le café étudiant. Pour le moment, celle-ci arborait un visage songeur, voir préoccupé et soucieux. Toute sa position corporelle semblait d’ailleurs trahir une certaine lassitude généralisée. Finn avait bien des défauts, mais habituellement il était assez bon avec les sentiments, ceux des autres du moins. En outre, il savait pertinemment que Yasmine vivait des moments assez éprouvants par les temps qui courraient, puisqu’elle lui en avait touché quelques mots la dernière fois qu’ils s’étaient croisés. C’est donc sans hésitation qu’il se leva promptement, quitte à perdre la place de choix qu’il occupait proche de la fenêtre pour aller à la rencontre de la NIMH et s’enquérir de son humeur dans le but plus ou moins avoué de la réconforté. Arrivé à sa hauteur, il lui mit la main sur l’épaule d’une manière qu’il espérait douce et pleine de sollicitude.

-Salut Yas! Je te dérange? Je t’ai vu de loin et j’me suis dit que je passerais te dire bonjour… Ça va? Tu as l’air un peu anxieux… quelque chose qui te chicote?

Alors même qu’il terminait sa phrase, Finn se fit la remarque qu’en fait, elle n’avait peut-être pas envie d’être dérangé et qu’il avait peut-être été trop intrusif. Après tout, il ne la connaissait pas tant que ça et elle n’avait certainement pas envie de parler de ses problèmes au premier venu…

-Euh… bien… euh… j’espère que tu… que ça ne te… bref tu n’es pas obligée de répondre si tu n’en a pas envie… c’est juste que… je… bien je fais une recherche vraiment barbante et je ne trouve rien, j’me suis dit que ça me changerait les idées de venir te voir et, bien… j’ai vu ton visage un peu songeur et… je… je me demandais si ça allait depuis la dernière fois, tu sais, avec Wal… euh… ouais… eug… non…

Sentant qu’il commençait à produire plus de sons inintelligibles que de mots précis, il se tut, à moitié conscient d’en avoir peut-être trop dit et d’avoir aggravé la situation et les soucis de la jeune fille.

La jeune femme n’avait pu s’empêcher de sursauter en sentant la main sur son épaule et elle se retourna rapidement pour savoir qui avait posé ses doigts sur elle. Espérant au plus profond d’elle-même qu’il ne s’agisse pas de Walter ou qu’une autre personne qui s’emmêlait dans ses pensées... Zòhra, par exemple. C’est avec soulagement qu’elle remarqua qu’il s’agissait de Finley St-James, jeune homme qu’elle trouvait sympathique et attachant, mais qui n’avait aucune présence autre qu’amicale dans son esprit ou dans son cœur. Elle le considérait comme un ami, rien de plus, rien de moins. La jeune femme lui devait son bref rapprochement avec Walter, après tout, même si rien de tout cela n’existait désormais et que leur amitié commençait, selon la NIHM, à être remise en question avec l’avalanche récente de disputes et de malentendus. Yasmine esquissa un sourire au jeune Litriù, elle l’aurait voulu plus convaincu, mais elle ne se sentait pas l’envie de se drapper derrière un sourire de façade qui voilerait entièrement son mal-être. Elle n’était pas au top et avait des soucis, pourquoi le cacher à un ami? Aucune raison, alors elle ne le ferait pas.

- Bonjour Finley, dit-elle doucement en refermant son livre.

- Non, non, tu ne me déranges pas, ajouta-t-elle sincèrement. Je vais bien, physiquement du moins, pour le reste c’est plus complexe. Et toi ?

S’en suivit ensuite une longue explication confuse de Finley à propos du fait qu’elle n’était pas obligé de répondre à ses questions si cela la dérangeait. La future médicomage ne put s’empêcher de sourire, franchement cette fois, en voyant le jeune homme s’emmêler dans ses mots. Doucement, elle lui indiqua un fauteuil libre à sa table.

- Tu peux t’asseoir si tu veux, on serait mieux pour discuter, dit-elle en souriant toujours, enfin, si tu as du temps pour discuter... je ne voudrais pas t’empêcher de faire ce que tu as à faire.

- Pour moi, la situation est toujours la même, entre Walter et moi c’est de plus en plus difficile et je vois mal comment cela pourrait s’arranger..., dit-elle simplement avant de murmurer douloureusement, à moins que je quitte le collège.

Yasmine ne voyait plus d’autres solutions aux conflits incessants qu’elle vivait avec Walter depuis qu’ils avaient repris contact plus réellement qu’au cours de leurs trois années de BUM. Elle voulait juste que cela s’arrête maintenant et elle ne pouvait pas aller contre elle-même. La jeune femme aimait parler des beaux moments qu’elle avait vécus, les moins beaux elle avait tendance à vouloir les enterrer, mais ce qu’elle considérait comme des beaux moments, elle les voulait bien vivant et elle ne parvenait pas à comprendre Walter dans tout cela, son obsession et ses colères quand elle faisait allusion à leur passé à Poudlard. Voulait-il réellement oublier qu’un jour ils avaient été amoureux et qu’ils avaient vécut de beaux moments avant la journée où tout c’était arrêté brusquement... Peut-être était-ce que cela lui faisait mal de se rappeler ces moments... mais ils n’en avaient jamais vraiment discuter, n’en avaient jamais vraiment eu la chance...

La jeune NIHM regardait Finley tandis qu’elle se questionnait intérieurement. Elle ne voulait pas vraiment quitter St-Barnaby, mais si elle ne trouvait pas une autre solution, moins difficile, elle n’aurait pas le choix et devrait partir. Cela serait mieux pour elle, pour Walter... pour Zòhra... et pour tous ceux qui étaient témoins directement ou indirectement des disputes entre Walter et elle.

- Désolée, murmura-t-elle consciente qu’elle s’était perdue dans ses réflexions depuis quelques minutes déjà tournant et retournant la situation dans sa tête à la recherche de solutions en vain. Si tu as des solutions à cette situation conflictuelle entre moi et Walter... autre que de quitter le collège – je l’ai déjà en tête celle-là – ou de mettre un terme à tout cela définitivement... dis-le-moi s’il te plaît, car moi je sais plus quoi faire!

À son grand soulagement, Yasmine ne paru pas outrée de son audace. Elle le salua au contraire d’un ton doux, comme à son habitude. Cette fois cependant, le sourire aimable de la jeune NIMH était teinté d’une certaine tristesse, indescriptible, contagieuse. Finn sentit son cœur se serrer un peu en la voyant ainsi. Il avait toujours appréciée Yasmine, tellement ordonnée et calme, analytique… tout le contraire de lui qui se faisait littéralement diriger par ses émotions. La voir en proie à un tel abattement avait quelque chose de déstabilisant, un pilier solide et stable qui chancelait peu à peu.


- Non, non, tu ne me déranges pas. Je vais bien, physiquement du moins, pour le reste c’est plus complexe. Et toi ?

Voilà, se dit-il, des paroles qui confirmaient son impression. Il n’était peut-être pas le plus sage des hommes, mais il avait toujours eut, bien malgré lui, un certain flair pour deviner les émotions qui affectaient les gens. Pratique pour détecter un mensonge. Là n’était cependant pas la question et il se hâta de répondre à son interlocutrice pour ainsi tenter de dissiper le malaise grandissant.

-Oh! Moi? Je vais… je vais bien.

Répondre à ce genre de question en apparence rhétorique posait problème à Finn qui aurait bien voulu détendre l’atmosphère par une blague ou un commentaire sympathique. Lui qui avait toujours été un peu timide et effacé, il avait pris l’habitude depuis quelques temps, d’être le bout en train de service. Ça lui la plupart du temps naturellement, c’était simple, il n’avait qu’à agir sans réfléchir. Ce qui, de toute évidence, semblait impossible pour le moment. Sa gêne prenait peu à peu le dessus, alors qu’il contemplait le visage triste de Yasmine sans réussir à trouver le mot qui console ou qui rassure, sans être capable de poser le geste qui apaise et réconforte. Il se tut donc, la contemplant sans rien dire, mal à l’aise. Son interlocutrice, apparemment plus dégourdie que lui l’invita à s’assoir, ayant certainement du avoir pitié du garçon qui se balançait d’un pied à l’autre en une sorte de danse étrangement maladroite.

- Pour moi, la situation est toujours la même, entre Walter et moi c’est de plus en plus difficile et je vois mal comment cela pourrait s’arranger... à moins que je quitte le collège.

Les derniers mots prononcés tombèrent comme des pierres dans l’estomac de Finn. Il ouvrit grand les yeux, étonné. Quitter le collège? Partir loin de St. Barnaby et ne plus y mettre les pieds? Et tout ça pour une histoire de cœur, pour Walter? Le moins qu’on puisse dire, c’est que Finn était surpris. En fait, il était plus que surpris, plutôt estomaqué. Lui-même n’ayant nulle part ailleurs où vivre, nulle attaches extérieur au havre que lui fournissait l’école, il était difficile pour le rouquin de concevoir vouloir quitter les lieux. Il pouvait concevoir qu’une relation aussi sérieuse et marquante que celle que semblaient entretenir Yasmine et Walter puisse nécessiter une coupure nette et radicale. Mais de la à remettre en question sa scolarité, perdre des amis, un milieu de vie confortable et accueillant… ça, il était certain que Finn n’aurait pu l’accepter. D’ailleurs, quitter le collège n’était-il pas réellement synonyme de fuite? Finn sentit son passé chez les gryffondor prendre sur lui, personnellement, pensa-t-il, il aurait préféré affronter les difficultés, régler le tout le plus rapidement possible afin de pouvoir passer à autre chose. Ce n’était pas la solution la plus facile, mais elle avait le mérite de ne pas laisser place à l’incertitude.

Le silence qui avait suivit la déclaration de la jeune fille commença à s’étirer, les deux étudiants étant chacun perdus dans ses propres réflexions. Finn, se doutant bien que dans cette situation, un simple mot de réconfort ne serait pas suffisant, il ouvrit la bouche dans une tentative avortée de prendre parole. Il aurait aimer donner son avis à Yasmine, lui dire que selon lui, la fuite n’était pas la solution, mais il se contenta de refermer la bouche en silence, ne sachant pas où trouver les bons mots, ceux qui serait vrai, qui atteindrait leur but sans pour autant blesser la jeune fille… Sa gêne avait encore une fois pris le dessus et il n’osa pas parler, de peur de faire irruption de manière indiscrète dans la vie intime de son amie. Celle-ci ne sembla pas remarquer les efforts de Finn pour la réconforter, trop absorbée qu’elle était par ses propres pensés. Elle sembla soudain se raccrocher à la réalité de la bibliothèque et prit la parole.

- Désolée, Si tu as des solutions à cette situation conflictuelle entre moi et Walter... autre que de quitter le collège – je l’ai déjà en tête celle-là – ou de mettre un terme à tout cela définitivement... dis-le-moi s’il te plaît, car moi je sais plus quoi faire!

Voilà qui venait résoudre le problème de sa gêne : Yasmine lui demandait directement son avis. Il se résolu à lui dire ce qu’il pensait réellement, espérant ne pas la blesser par le fait même :

«Tu sais Yas, je ne crois pas que quitter St. Barnaby soit la solution… je veux dire… ce n’est pas juste Walter que tu laisse derrière si tu pars, c’est tout les amis que tu t’es fait ici, sans parler de ta scolarité, de tes habitudes, de… de tout en fait! Tu ne devrais pas renoncer à ta vie pour un gars, ça n’en vaut pas la peine! Puis, si tu pars, ça ne règlera rien, au contraire… ne m’as-tu pas dit que tu t’étais inscrit à St. Barnaby justement pour rejoindre Walter alors que tu avais la chance d’aller étudier partout ailleurs? Si tu quitte en laissant ici tout en plan, tu y penseras constamment… Tu passeras ta vie à te demander «Et si»…»

Finn prit une pause pour reprendre son souffle, étonné lui-même pas la longueur de son discours.

«Je crois que le mieux, c’est de tout mettre au clair avec Walter, si ce n’est pas déjà fait. Comme ça, tu es fixé, et ce sera plus facile d’élaborer un plan d’action ensuite. Puis, tu pourrais essayer d’éviter de croiser ou parler avec Walter pendant quelque temps, histoire de passer à autre chose. Sans couper définitivement les liens, plus comme… prendre une pause pour mieux tourner la page et pouvoir rester amie avec Walter…»

Le rouquin se tût en grimaçant… bon, là, ce n’était peut-être pas la ce qu’il aurait fallut dire. C’était presque comme s’il s’était improviser messager de Walter pour dire à la jeune fille «ça ne le fait pas entre nous, mais on peut rester amis…». Ce n’était pas l’intention de Finn, il avait juste essayer de trouver à la jeune fille une solution qui lui permettrait de pouvoir continuer à côtoyer le binoclard, sans pour autant se faire du mal à chaque fois qu’elle le voyait.

«D-désolé… je… je ne sais pas trop quoi dire… t-t-tu n’es pas obliger d’écouter mes conseils si tu n’es pas d’accord…»

Yasmine regarda Finley tandis qu’il lui disait ce qu’il croyait être une solution. Parler avec Walter... elle avait essayé de lui parler au cours des dernières semaines, mais ils entraient toujours en conflits quand elle essayait de s’ouvrir à lui et de lui dire ce qu’elle ressentait. Éviter l’étudiant qui avait fait chavirer son cœur... comment le pourrait-elle? Quoique cela pourrait être tellement mieux qu’elle ne le voit plus... qu’elle mette de la distance entre eux.

- Tu as sans doute raison Finley, murmura-t-elle doucement, je devrais sans doute l’éviter pour un temps. Discuter cela ne mène nulle part malheureusement. Nous ne parvenons pas à nous comprendre lui et moi, comme si nous ne parlions pas la même langue. J’ai l’impression qu’il ne parvient pas à comprendre que cela me fait du bien de me souvenir des beaux moments du passé et d’en parler.

Elle ferma son livre en mettant un signet pour garder sa page et le repoussa doucement.

- Tu sais je ressens le besoin de parler des bons moments, ajouta-t-elle en fermant les yeux momentanément, comme cela j’ai l’impression qu’ils restent bien vivants, que tout est... comme avant. Les moments plus douloureux, j’essaie de les effacer, de les oublier.

La jeune étudiante soupira profondément. Elle comprenait que son obsession pour les bons moments puisse déplaire à Walter... et aux autres sans doute, mais elle n’y pouvait rien. Elle se sentait tellement bien quand elle effaçait les mauvais moments et qu’il ne restait que les plus beaux.

- Je vais essayer d’éviter Walter pour un moment, finit-elle en reposant son regard sur Finley, ce sera sans doute plus facile comme cela et je pourrai peut-être réussir à repartir dans une autre direction. Accepter la situation c’est déjà fait, mais... c’est une toute autre chose que de parvenir à refaire sa vie...

Yasmine rangea son livre dans son sac à bandoulière puis se leva lentement.

- Merci Finley... tu es le meilleur! J’avais besoin de parler à quelqu’un et de me faire guider un peu. Je dois y aller maintenant désolée, il se fait tard et je commence à avoir faim.

Elle sourit au jeune homme avant de se retourner pour quitter la bibliothèque.